Généalogie d'une famille recomposée
L'arrivée dans quelques mois de notre petite princesse m'a poussé à me replonger dans les méandres des familles recomposées.
Cette situation imposée par l'amour qui nous fait connaitre les montagnes russes : tantôt de grands bonheurs faits de rires, de confidences, de complicité et d'amour tantôt des situations d'incompréhension qui nous font nous sentir nous les belles-mères (et beaux-pères même si je pense que les hommes sont moins touchés que les femmes) mises de côté par la famille déjà constituée voire rejetées et incomprises.
Mais il faut s'accrocher, donner le meilleur de soi pour essayer que le bien l'emporte sur le mal puis aussi que cette petite vie en cours de fabrication arrive dans un univers rempli d'amour, que ses premiers souffles soient entourés d'amour et de bienveillance. Oui il faut toujours protéger l'enfant qui est chahuté d'une vie à l'autre mais il ne faut pas pour autant sous-estimer la complexité de la situation pour ce bébé qui arrive. Certes il est voulu, il sera entouré de ses parents qui l'aiment, qui s'aiment et qui sont unis mais il comprend déjà qu'il a un ou plusieurs frères et soeurs qui vont et viennent d'une vie à l'autre en les laissant, les "abandonnant", ne pas oublier que lui aussi peut connaitre un sentiment de rejet et d'incompréhension que lui aussi peut se retrouver perturber par ses allers et venues que lui non plus n'a jamais souhaités.
Sans compter le conjoint prit entre deux feux : un enfant à 100% du temps et un autre à 50% : quelle complexité pour le cerveau pour la gestion des activités, de la vie, du temps, voire des sentiments. On peut vite se laisser aller à créer un lien plus fort avec l'enfant toujours présent ou au contraire se concentrer sur celui en garde alternée lors de sa semaine quitte à oublier l'autre enfant en se disant sa maman s'en occupe puis je lui ai tellement consacré de temps la semaine dernière... En quelque sorte se retrouver à avoir deux enfants en alternance dans son coeur...
Bilan : nous devons protéger notre famille en aidant son conjoint à combattre sa culpabilité, en entendant ces enfants qui ne sont pas de nous mais qui font partis de notre vie et de notre famille car liés à toujours à nos propres enfants et que nous aimons, puis en protégeant nos enfants de cette instabilité dans laquelle ils arrivent et de cette vie facile que l'entourage leur attribue d'office car ceux-là ont la chance d'avoir leurs deux parents et enfin en nous protégeant nous-même de ce rôle d'arbitre, en se laissant aller à aimer sans penser, ne pas s'abandonner à ses démons qui nous prennent aux tripes et qui nous font craindre que tout ne se déroule pas dans le meilleur des mondes pour tout le monde.
Après avoir annoncé à la petite puce de mon mari qu'elle allait devenir grande soeur un doute m'a envahit me faisant réaliser à quel point il pouvait être complexe pour elle du haut de ses six ans de comprendre quel était le lien entre elle et sa soeur. Il est facile d'employer ce mot mais comment lui faire comprendre son importance surtout dans une époque où les liens de parenté sont utilisés à la va-vite avec des taties et tonton distribués en abondance aux amis, des papis et mamies par alliance ... C'est là que m'est venu l'idée de la représentation d'un arbre généalogique.
Il n'a pas été aisé de trouver des modèles pour famille recomposée encore une preuve de ce déni social, comme si l'on ne devait pas chercher à connaitre nos origines quand nous sommes des enfants de parents séparés ou nés d'une seconde voire troisième union...
Pourtant je pense qu'il est d'autant plus utile de s'arrêter dessus dans ces cas de figure, afin de démystifier ces relations, en clarifiant les liens présents de ceux passés, avec des petits chérubins des deux côtés qui eux seront bel et bien liés pour toujours.
Au début j'ai voulu faire un véritable arbre et remonter toutes les familles puis j'ai réalisé et à juste titre qu'il fallait commencer par la base, les racines, et nous pourrons toujours l'agrandir ensemble dans le futur.
J'ai pensé à le réaliser bien sûr pour la fille de mon mari pour l'aider à visualiser dans quelle mesure sa sœur serait sa sœur puis aussi notre propre fille qui elle aussi sera amenée à s'interroger sur ce qui la lie à cette sœur à moitié dans sa vie qui n'a pas la même maman qu'elle mais qui est pourtant toujours présente dans son cœur.
Et j'ai bien fait de faire ce dessin car oui, à cet âge-là on ne sait pas comment l'on fabrique les bébés on nous dit juste que papa et maman ont été amoureux que nous sommes nés puis qu'ils n'étaient plus amoureux et qu'ils se sont séparés. Puis voilà papa a une nouvelle amoureuse et boum on se retrouve grande sœur ! Mais comment et pourquoi ? De quoi s'inquiéter ...
Elle passe beaucoup de temps à regarder ce dessin et elle a compris plusieurs choses : que sa maman et moi étions sur un "pied d'égalité", que dorénavant j'allais aussi être maman, que sa maman avait toujours sa place même dans notre maison à travers cette représentation ainsi que ses grands-parents maternels. Que son papa était le lien commun et que ça expliquait que ce bébé allait être sa sœur, qu'elle devrait partager ses grands-parents paternels et que oui mes parents allaient avoir une place dans la vie de sa sœur et donc dans la sienne.
Voilà pourquoi elle le regarde plusieurs fois et demande à ce qu'on lui raconte car ce n'est pas évident à comprendre à cet âge , et pourtant elle a la chance d'être dans un schéma dans lequel tout le monde s'entend et dans lequel son bien-être est prioritaire. Mais voilà ses racines sont plus complexes que les autres enfants, peut-être plus belles que d'autres car remplies d'amour, chaque histoire familiale est différente, mais on ne peut nier que tous ces enfants qui ont plus de deux troncs au départ de leur arbre généalogique partent avec des valises plus lourdes que d'autres enfants. A nous parents et beaux-parents de les aider à alléger leurs bagages de jour en jour, d'année en année en les aidant à exprimer leurs sentiments, sans qu'aucun tabou n'existe dans leurs maisons...
Et honnêtement moi aussi ce dessin m'a aidé même s'il n'a pas été sans douleur : car oui quand on est petite fille on ne rêve pas d'un prince charmant avec une ex et un enfant, on n'aspire pas à apparaître sur un dessin au même niveau qu'elle, de savoir que l'on sera toujours liée à ce passé car nos filles seront sœurs , on n'a pas non plus envie d'imposer cette recomposition à ses enfants et même à ses propres parents qui sont juste en âge d'être grands-parents et de vouloir profiter de l'arrivée de leur première petite-fille, on n'a pas forcément envie d'expliquer les pourquoi du comment ... Puis l'amour est là et permet encore une fois de déplacer des montagnes et de donner le meilleur de soi dans des situations que l'on n'aurait jamais pensé connaître ou pouvoir surmonter...
J'ai envie de croire que c'est cette magie de l'amour qui m'a tant changé, qui m'a assagi et permit de mettre de côté mon caractère jaloux pour le bien de notre couple, de sa fille et maintenant de la notre qui a son coeur qui bat dans mon ventre...
Je sais que c'est cette magie qui a fait de moi une belle-mère et maintenant une maman belle-mère <3